NOCES DE CRISTAL
Un grand jour que ce dimanche
Sous un ciel merveilleux
Madame en robe blanche
Monsieur en complet bleu
Ont invité famille et amis
A l'anniversaire de mariage
Tout le monde chante et ri
Même le curé du village
Qui en ce mois d'avril
Il y a de cela quinze ans
Après avoir lu l'Evangile
Et donné les consentements
Avait béni leur union
Pour le meilleur et le pire
Avant de jeter les cotillons
Devant la foule en délire
Mais ce qu'on retiendra surtout
De ce souvenir unique
C'est ce qui se passa après coup
Dans le jardin public
Pour l'occasion on avait
Dressé tables et chapiteau
Fait cuire les poulets
Amené le vin par tonneaux
Si la journée fut bon enfant
Sans excès de folie
On ne peut pas en dire autant
Lorsque sonna minuit
Sentant un coup fumant
Surtout à la pleine lune
Tous les mineurs présents
Partir hors de la commune
La première à ouvrir le bal
Fut la maîtresse d'école
Avec une danse abdominale
A faire pâlir un créole
Complètement en transe
Sur la grande table en chêne
Où elle se balance
Avec des gestes obscènes
Puis Jeannette et Anatole
Pris par la musique
D'un bon vieux rock ' n roll
Qui plus est acrobatique
S'excitèrent jusqu'au point
De s'envoyer en l'air
Et de finir dans un coin
Derrière le cimetière
Comme souvent dans les beuveries
Nous avons droit à l'effeuillage
Et qui s'y colle c'est Marie
Habituellement aux fromages
Elle excite l'assemblée
Avec son regard pétillant
Et elle se met à rêver
Malgré ses quatre-vingts ans
« Va de retro Satanas »
S'écria le Père Colateur
Devant le maire de la paroisse
Et ses bouffées de chaleur
Depuis son élection
Il trouva toujours l'excuse
De baisser son pantalon
Pour sortir l'arquebuse
Comme au temps des romains
Et leurs « Veni vidi vici »
Jeu de mains et de vilains
Tournèrent à l'orgie
Et sous le drapeau suisse
Dressé pour l'occasion
Il n'y avait pas que les cuisses
Des poulets en action
Les pompiers habitués au feu
Jamais parole d'officier
N'avaient vu cela « Oh mon Dieu ! »
Une telle ampleur un tel brasier
Du coup le commandant en chef
Sortit les lances à incendie
Et sans aucun grief
Ils se jetèrent dans la partie
Même la maréchaussée
A cheval sur les principes
Au lieu de les raisonner
En l'air jetèrent leurs slips
Ils sortirent les menottes
Et ils tirèrent à blanc
Tout en prenant des notes
Sur les contrevenants
Léon bientôt centenaire
A retrouvé sa jeunesse
Peut-être pour sa dernière
Excité par toutes ces fesses
Il cria « Haut les cœurs »
Et se mit à déambuler
Recherchant avec ardeur
A honorer la mariée
Aux premières lueurs du jour
Quand le coq poussa son cri
Les protagonistes tour à tour
S'écroulèrent anéantis
Le curé et son goupillon
Enfermé dans le clocher
Prononça l'absolution
Sur ses ouailles et leurs pêchers
C'est ainsi qu'aujourd'hui
En souvenir de ces années
Tout le monde est réuni
Même le Léon revigoré
Qui attend sagement
Une nouvelle fois le final
C'est une question de temps
Comme ces noces de cristal
(Noces de cristal. Copyright © Didier Bovard 2013)
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